Les infections urinaires sont les infections bactériennes les plus souvent décrites dans le monde, Escherichia coli étant de loin le principal pathogène. Elles représentent près de 15% des prescriptions d’antibiotique en France et donc un facteur majeur de résistance bactérienne. Une évaluation prospective de la conformité aux recommandations de toutes les antibiothérapies prescrites a été réalisée auprès de médecins généralistes en France et a révélé que 50 % des prescriptions étaient inutiles et 33 % inappropriées. Ces résultats sont parfaitement en accord avec les données internationales. Parmi les infections urinaires, la pyélonéphrite aigue mérite une attention particulière car une antibiothérapie à large spectre est recommandée pour initier le traitement : Fluoroquinolones ou céphalosporines de 3ème génération par voie parentérale. Une désescalade par antibiothérapie à spectre étroit est ensuite conseillée à l’obtention des résultats d’antibiogramme lorsque l’évolution clinique du patient est favorable.
Le but de cette étude récente est d’évaluer la fréquence de la co-résistance aux antibiotiques recommandés dans les pyélonéphrites aigues communautaires ou associées aux soins à Escherichia coli et d’identifier les situations sans alternatives aux fluoroquinolones.
Les données de cette étude ont été collectées dans un réseau de 1 311 laboratoires de biologie médicale (LBM) répartis sur les 13 régions de France métropolitaine et la Martinique (mission PRIMO).
Du 1er janvier au 31 décembre 2020, les antibiogrammes d’Escherichia coli isolés de prélèvements urinaires à visée diagnostique chez des femmes d’âge >15 ans vivant à domicile ou résidents d’Ehpad ont été collectés.
Le pourcentage de souches résistantes à l’amoxicilline seule ou combiné à une résistance à amoxicilline/acide clavulanique, trimetoprime+sulfaméthoxazole, cefixime ou fluroquinolones a été calculé et comparé par catégories d’âge et de type de pyélonéphrite aigue (communautaire ou associée aux soins).
Parmi les 291367 souches d’Escherichia coli isolés de pyélonéphrites aigues communautaires, 60.3% étaient sensibles à l’amoxicilline et 99.1% aux alternatives orales aux fluoroquinolones. La co-résistance à l’amoxicilline et trimetoprime+sulfaméthoxazole est plus élevée chez les femmes de plus de 65 ans comparée aux femmes de moins de 65 ans (7.1% vs 6.1%), tout comme la co-résistance à l’amoxicilline, amoxicilline/acide clavulanique et trimethoprime+sulfaméthoxazole (8.6% vs 10%). Parmi les 11340 souches isolées de pyélonéphrites associés aux soins, 51.2% était sensible à l’amoxicilline et 98% aux alternatives orales aux fluoroquinolones. La co-résistance à l’amoxicilline, amoxicilline/acide clavulanique et/ou céfixime est plus élevée chez les femmes de plus de 65 ans dans le cadre de pyélonéphrites associées aux soins que dans les pyélonéphrites communautaires (respectivement 11.9% vs 15.3%; 0.8%vs2.8%;1.7%vs 4.4%).
Basé sur ces résultats, la prescription d’alternatives orales aux fluoroquinolones chez des patientes peut être possible dans plus de 99% des cas de pyélonéphrites communautaires et dans plus de 98% des cas de pyélonéphrites associées aux soins en considérant les 4 ATB testés de façon séparée ou en association : AMX +/- AMC, CFX, STX. Le but est bien sûr de prioriser ces ATB afin de ne pas augmenter inutilement le risque de résistance aux fluoroquinolones qui seraient prescrites en première intention.
Cette étude a permis d’obtenir des résultats sur un grand nombre d’échantillons provenant des différentes régions de France. Cependant, certaines données comme les facteurs de comorbidités, l’histoire clinique ou la symptomatologie sont manquantes. Ainsi, la différenciation entre pyélonéphrite, cystite simple ou colonisation urinaire n’a pu être faite de façon totalement satisfaisante.
Ref : Assessment of co-resistance to antibiotics recommended for acute pyelonephritis among Escherichia coli clinical strains from community and nursing homes acquired urinary tract infections.
Author(s): Leroy, Anne-Gaëlle; Lemenand, Olivier; Thibaut, Sonia; Coeffic, Thomas; chauveau, marie; Lesprit, Philippe; Caillon, Jocelyne; Boutoille, David; Birgand, Gabriel
https://doi.org/10.1093/jac/dkae431