Le dépistage du cancer de la prostate reste un sujet controversé. D'un côté on dispose d'un marqueur tumoral spécifique d'organe, le PSA, facile à doser et peu cher qui permettrait de traiter précocément les sujets atteints. D'un autre côté, le risque de faux positifs conduisant potentiellement à des traitements invasifs inutiles, fait hésiter les pouvoirs publics pour systématiser le dépistage. Sans oublier le risque de faux négatifs qui conduisent à des cancers manqués. Mais la donne devrait changer grâce à l'IRM, qui permet d'éviter des biopsies inutiles, et au recours à une « surveillance active », par laquelle les hommes atteints d'un cancer à un stade précoce sont suivis et ne subissent un traitement que si leur maladie progresse.
Les directives et les politiques actuelles des gouvernements et des organismes de santé européens restent cependant toujours contradictoires et peu claires, ce qui contribue à augmenter le taux de tests opportunistes et conduit à une inégalité d'accès au diagnostic précoce (les hommes bien informés étant plus susceptibles de se faire dépister et d'obtenir un diagnostic précoce).
Une étude neerlandaise a passé en revue les politiques de détection précoce dans l'ensemble des pays de l'Union européenne et a organisé des groupes de discussion avec des urologues pour déterminer comment les directives étaient interprétées dans la pratique clinique. Elle a montré que les directives de certains pays sont clairement opposées au dépistage, tandis que d'autres ne s'engagent pas alors que certains enfin l’organisent de manière officielle!
Dans certains pays, c'est encore plus ambigu. Les directives britanniques NICE par exemple paraissent d’ailleurs incongrues : Signalant qu’aucune preuve n’existe en faveur du dépistage par le PSA, ces directives ajoutent que n'importe quel homme peut demander un test du PSA s'il le souhaite ; avec pour résultat que les hommes informés et motivés posent des questions, tandis que d'autres (dont de nombreux afro-caraïbéens, a priori plus à risque) ne le font pas, de telle sorte que nombre de cancers de la prostate passent inaperçus.

Afin de rationnaliser et d'harmoniser les politiques de dépistage du cancer de la prostate, PROBASE, une étude allemande toujours en cours, étudie différents protocoles sur plus de 20 000 hommes âgés de 45 à 50 ans. Les participants ont été répartis en trois groupes en fonction de leur taux de PSA initial. 
En pratique, lorsque le taux de PSA est <1,5 ng/ml, ils sont considérés comme à faible risque et ne font l'objet d'un deuxième dosage que 5 ans après. Lorsque le taux de PSA se situe entre 1,5 et 3 ng/ml, ils sont considérés à risque intermédiaire et font l'objet d'un suivi après deux ans. Enfin, quand le taux de PSA est >3 ng/ml, ils sont considérés comme à risque élevé, ce qui demande une IRM et une biopsie.
Parmi les 20 000 hommes recrutés, 12 517 ont bénéficié d’un deuxième test à l'âge de 50 ans. Les résultats présentés par les auteurs ont montré que 1,2 % d'entre eux (146 au total) avaient des taux de PSA >3 ng/ml et ont été référés pour une IRM et une biopsie. Seuls 16 de ceux-ci ont par la suite été diagnostiqués porteurs d'un cancer, soit seulement 0,13 % de la cohorte totale, ce qui reste raisonnable en termes d'incidence.
Ces résultats suggèrent que l'intervalle de dépistage adapté au risque (basé sur le taux initial du PSA), c’est-à-dire des intervalles de suivi de 2 ans pour les personnes à risque (taux >1 ng/ml), pourrait être allongé pour les personnes à faible risque.
L’étude est toujours en cours, et pourrait aboutir au constat qu'un intervalle de dépistage encore plus long (5 ans), est possible sans risque supplémentaire, en minimisant ainsi à la fois les coûts du dépistage et les risques de surtraitement.
Dans ce contexte, les résultats de l’essai PROBASE pourraient contribuer à faire bouger les politiques nationales dans un sens approprié.

References
1. Albers P, et coll. Challenging EAU Guidelines on Prostate Cancer Risk Definition in the Screening Setting: Insights from the PROBASE Trial. EAU 2024, Paris, 5-8 avril 2024. Session Guideline changes in screening and diagnosis for prostate cancer?
2. Beyer K, et coll. Why is there a need to re-think Prostate Cancer early detection ?  EAU 2024, Paris, 5-8 avril 2024. Abstract#A0666.

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