Le protoxyde d'azote a connu une destinée curieuse. Découvert en 1772, il a d'abord fait la joie des comédiens et des spectateurs du XIXème siècle en étant utilisé comme gaz hilarant lors de spectacles. Le dentiste     américain Welles ayant eu l'intuition de ses propriétés anesthésiantes, il a rejoint la pharmacopée et a été, avec l'éther et le chloroforme, à l'origine de l'anesthésie. Longtemps décrit comme inoffensif et sans risque d'addiction, son usage a de nouveau été détourné et sa consommation massive et croissante a démontré sa toxicité neurologique, au point d'être repertorié dans le DSM-5 des psychiatres américains. Consommé par inhalation au moyen d'un ballon de baudruche pré-insufflé (les historiques cartouches de bombe à chantilly ont été remplacées par des bombonnes illicites mais facilement disponibles sur internet permettant des consommations répétées pendant plusieurs heures pour les plus importantes), il a des effets toxiques rapides puis chroniques en cas d'addiction. Le protoxyde d'azote interagit avec différents neuro-récepteurs (NDMA, GABA) et les systèmes opiïdes et noradrénergiques afin d'entraîner un état de calme, d'euphorie et d'hilarité dans unj premier temps, puis des états hallucinatoires à plus forte dose. Des sensations vertigineuses, des céphalées, une désorientation et une hypoxie sont également décrites en cas de consommations massive avec en plus des conséquences accidentogènes.
Mais ce sont les effets neurologiques persistants qui inquiètent le plus les addictologues avec une recrudescence de neuropathies périphériques, alliant des troubles sensitifs (paresthésies ou hypoésthésies, ataxie proprioceptive) et motrices (troubles de la marche, en particulier avec steppage) jusqu'à des syndromes de sclérose combinée de la moelle. Le diagnostic repose essentiellement sur l'EMG et l'IRM médullaire mais la biologie peut également être mise à contribution.
Initialement dans le diagnostic différentiel d'autre neuropathies où l'analyse du LCS ne montre pas d'anomalie significative : pas de dissociation significative albumino-cytologique du Guillain Barré par exemple, d'hyperleucocytoracchie ou de synthèse intra-thécale d'Ig lors de maladies infectieuses ou inflammatoires du SNC.
Le dosage du protoxyde d'azote dans les liquides biologiques n'étant pas envisageable en routine du fait de sa demi-vie très courte et de son élimination rapide dans l'air expiré, on a du avoir recours à d'autres moyens pour son diagnostic et surtout l'évaluation de la gravité des troubles liés à sa consommation. Ainsi, c'est surtout pour l'exploration des désordres métaboliques qu'entraîne la consommation chronique du protoxyde d'azote que la biologie a été exploitée. La cible la plus documentée est la vitamine B12 (ou cobalamine) qui contient un ion cobalt modifié par le gaz et inactivant ainsi son action dans différents processus : Signalisation cellulaire, méthylation de l'ADN, de l'ARN et de différentes protéines jouant un rôle majeur en épigénétique. 
L'une des réactions inactivée est la transméthylation homocystéine <=> méthionine. Ce processus, auquel participe également d'autres vitamines (B9, B6, B2) aboutit normalement à la synthèse de glutathion qui est un anti-oxydant majeur.
La vitamine B12 est également impliquée dans des voies métaboliques mitochondriales, en particulier celle de la dégradation de l'acide méthyl-malonique.
Le dosage de la vitamine B12 n'apporte pas d'argument décisif puisque c'est surtout la fonction qui est altéré plutôt que la concentration. Il peut simplement réveler un déficit d'apport qui est un facteur aggravant (mais paradoxalement, les consommateurs assidus s'automédiquent fréquemment). Même si aucun n'est totalement spécifique, 2 marqueurs précédement évoqués prédominent dans la literrature :
- L'homocystéine qui est le plus sensible car une élévation importante de sa concentration est fréquemment retrouvée chez les consommateurs, en particulier dans les premiers jours suivant les prises. Un taux normal est donc plutôt rassurant ou reflète un probable espacement dans la consommation. A noter que d'autres troubles métaboliques acquis fréquents (insuffisance rénale, hypothyroïdie, hypovitaminose B9 ou B6) peuvent entrainer l'élévation de sa concentration.
- L'acide méthyl-malonique, qui est moins sensible mais plus spécifique est retrouvé augmenté en particulier dans les cas graves et reflet d'une imprégnation métabolique plus profonde avec des troubles moins réversibles.
Aucun de ses marqueurs n'étant strictement relié à la quantité de protoxyde d'azote consommé, il convient donc de les associer et de compléter le bilan avec les dosages des vitamines associées dans les voies métaboliques perturbées (vitamines B12, B9, B6), un hémogramme et un bilan hépatique et rénal. Ils devront être répétés pour controler l'arrêt de la consommation en cas de normalisation d'un bilan initialement perturbé.

Ref : Revue de biologie medicale N°376 - Jan/Fev 2024